Suicide de Dinah Gonthier, racisme et lesbophobie à l’école : le silence assourdissant de Jean-​Michel Blanquer

Le 5 octobre dernier, Dinah Gonthier, une adolescente de 14 ans, récemment entrée en classe de seconde, s’est donnée la mort. Dinah était victime de harcèlement scolaire, raciste et lesbophobe, de la part de ses camarades de classe.

Si le ministre de l’Éducation nationale Jean-Michel Blanquer s’est exprimé sur ce drame, c’est pour dénoncer le harcèlement et cyber-harcèlement scolaires et assurer que son ministère mettait les moyens nécessaires pour lutter contre ce phénomène. Pas un mot sur la lesbophobie subie par Dinah Gonthier. Pas un mot sur le racisme.

A l’heure où les jeunes LGBTQIA+ sont bien plus à risques de faire une tentative de suicide ou de se suicider que les jeunes hétérosexuel·les ou cis (plus d’un tiers des jeunes trans auraient déjà fait une tentative de suicide) (1), ce silence est assourdissant. À l’heure où les chercheur·es ont mis en évidence le rôle du harcèlement et des humiliations dans le cadre scolaire dans ce risque accru, ce silence est assourdissant.

En septembre 2020, Doona, étudiante trans à Montpellier, se donnait la mort. En décembre, c’est Avril, adolescente trans qui se suicidait à Lille. Combien de jeunes LGBTQIA+ doivent mourir pour que le gouvernement réagisse ? Jean-Michel Blanquer n’a pas plus mentionné les insultes racistes odieuses subies par Dinah Gonthier. On sait pourtant que le racisme entrave non seulement les scolarités et les parcours de vie des personnes racisées, mais a aussi des conséquences dramatiques sur leur santé mentale.

Les mots sont importants. Les actes aussi. Le ministère de l’Éducation nationale, plus préoccupé à lutter contre un prétendu islamo-gauchisme des enseignant·es ou de défendre une version agressive et raciste de la laïcité, n’est pas à la hauteur des enjeux que requiert un vrai travail de prévention contre le racisme et les LGBTQIA-phobies.

Le 30 septembre, le ministère a enfin publié une circulaire "Pour une meilleure prise en compte des questions relatives à l’identité de genre en milieu scolaire", sur l’accueil des enfants et jeunes trans à l’école. Ce texte, très insuffisant, renforce les violences faites aux enfants trans en empêchant l’autodétermination de leur identité, et méprise le travail des associations (2) : une première version de la circulaire a été censurée par le cabinet du ministre, la qualifiant de "propagande communautaire LGBT"(3). La mention des enfants intersexes dans la circulaire a, elle, simplement disparu dans la version finale.

Pendant que nos dirigeant·es inventent de nouveaux mots et s’alarment d’un prétendu "wokisme" qui gangrènerait nos établissements, nos élèves meurent. Sud Éducation 93 exige que de véritables moyens soient alloués à la lutte contre le racisme, les LGBTQIA-phobies et contre le harcèlement de toute sorte à l’école et qu’un plan de lutte ambitieux contre les discriminations soit mis en place.

Nous apportons notre soutien indéfectible à la famille et aux proches de Dinah, ainsi qu’à tout·es les victimes de LGBTQIA+phobies et de racisme.

(1) INPES, "Les minorités sexuelles face au risque suicidaire", 2014.

(2) https://www.maisonegalitefemmeshommes.fr/uploads/Ressource/0b/766_665_TRANSIDENTITES-A-L-ECOLE.pdf

(3) https://www.mediapart.fr/journal/france/021121/eleves-trans-la-circulaire-dont-blanquer-ne-voulait-pas